Fortnite, frustration : les jeux vidéo peuvent-ils vraiment conduire à la violence ?

Les jeux vidéo comme Fortnite rendent-ils violents ? Explorez le rôle de la frustration et de l’échec dans ce débat controversé.

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MàJ le
Un homme joue à Fortnite sur sa télévision
Photo by Erik Mclean on Unsplash

Tl;pl (trop long ; pas lu)

  • Le meurtre d’une jeune collégienne de 11 ans relance la question : les jeux vidéo rendent-ils violents ?
  • C’est un raccourci simpliste. Les études montrent, par contre, que la frustration liée à l’échec, et non la violence des images, peut être un facteur déclencheur.
  • Un contexte familial déjà marqué par des comportements violents semble aussi se dessiner pour le suspect.
  • La violence résulte d’accumulations émotionnelles et d’un contexte pré-éxistant, plutôt que des jeux eux-mêmes.

Le 7 février 2025, une collégienne de 11 ans a perdu la vie dans un drame qui secoue l’Essonne et la France entière. Le principal suspect est décrit comme un joueur passionné, voire « accro », à Fortnite, un jeu de bataille et survie en ligne où 100 joueurs s’affrontent, et seul le dernier survivant est sacré vainqueur. Selon les enquêteurs, il aurait agi sous le coup de la frustration après une défaite dans son jeu préféré. Ce fait divers relance une question souvent posée : les jeux vidéo peuvent-ils conduire à la violence ? Ou s’agit-il d’un raccourci simpliste ? La réponse est nuancée.

Les clés pour comprendre 🔑

Pour répondre à cette question, il faut d’abord expliquer deux idées généralement avancées lors de ce type de drame.

Le phénomène de désensibilisation

La désensibilisation suppose qu’une exposition répétée à des contenus violents (comme dans certains jeux) érode progressivement l’empathie des joueurs. En d’autres termes, on deviendrait moins sensible à la souffrance des autres, car on serait « habitué » à la violence.

Une étude menée entre 2020 et 2022 sur 3 010 adolescents tchèques de 13 à 17 ans infirme cette hypothèse. Sur une période de deux ans, les chercheurs n’ont trouvé aucune diminution notable de l’empathie, ni hausse significative d’agressivité due aux jeux vidéo, même violents.

L’escalade de la violence et le rôle de la frustration

L’idée d’escalade de la violence est que jouer à des jeux violents pourrait rendre progressivement plus agressif, voire inciter à des comportements extrêmes comme commettre un acte violent dans la réalité.

Cependant, les travaux scientifiques, comme ceux de l’Université de Rochester, montrent que cette théorie ne tient pas non plus. Si les joueurs deviennent agressifs, ce n’est pas à cause des images violentes, mais à cause de la frustration ressentie lors d’échecs (ou de contrôles jugés mal conçus).

Et c’est là que ça devient plus complexe. Par exemple, lorsqu’un joueur ne parvient pas à maitriser les commandes d’un jeu, lorsqu’il perd ou se sent impuissant face à une situation virtuelle, cela génère un pic d’irritation. Ce phénomène, dont un des exemples est connu sous le terme de « rage-quit » (abandonner sous la colère), est une réaction fréquente parmi les joueurs, quel que soit le type de jeu (violent ou non).

Les scientifiques ont mis en lumière que cette frustration agit comme une agression interne, une montée d’adrénaline qui peut déborder sous forme de comportements hostiles : jeter sa manette, frapper son écran ou son clavier… Des réactions qui ne sont donc pas liées au contenu du jeu, et ne sont d’ailleurs pas exclusives aux jeux vidéo (on observe des comportements similaires dans le sport ou toute autre activité compétitive), mais au sentiment d’échec ou de perte de contrôle.

Ce que ces éléments révèlent 🤔

Dans le cas actuel, les enquêteurs évoquent un coup de colère du principal suspect après une défaite à Fortnite. Un échec peut fortement affecter ceux qui sont particulièrement sensibles à la compétition ou à l’humiliation d’une défaite.

Pourtant, il serait réducteur de blâmer le jeu lui-même. Ce drame semble davantage traduire une accumulation de facteurs, dont une mauvaise gestion de la frustration et des déclencheurs émotionnels du suspect amplifiés par un contexte familial déjà marqué par des comportements violents (envers sa sœur notamment). Les autorités restent d’ailleurs prudentes sur le rôle précis de Fortnite dans ce passage à l’acte.

Comment éviter que la frustration déborde ? 🛠️

Plutôt que de diaboliser les jeux vidéo, il semble plus utile d’éduquer les jeunes (et les moins jeunes) à la gestion de la frustration. Cela inclut :

  • Apprendre à gérer les émotions liées à l’échec, en encourageant des pauses ou un changement d’activité après des frustrations répétées.
  • Encourager le dialogue pour déceler les signes d’un attachement trop intense (comme à certains jeux compétitifs par exemple).
  • Sensibiliser les individus à une compétition saine, où l’échec fait partie d’un apprentissage et non d’une humiliation.

En résumé 📌

Le véritable enjeu ne réside pas dans le contenu violent des jeux vidéo, mais dans la frustration qu’ils peuvent engendrer… mais qui peut aussi être engendrée par toute autre activité compétitive. Ce stress, lorsqu’il s’accumule sans autre exutoire, peut générer des comportements imprévisibles.

C’est l’accompagnement des joueurs et l’éducation émotionnelle sur lesquelles il faut mettre l’accent. Comprendre ces mécanismes, c’est prendre conscience que la violence ne naît pas des pixels, mais des émotions que nous ne parvenons parfois pas à dompter.

Pourquoi la frustration est-elle fréquente dans les jeux vidéo ?

Les jeux vidéo reposent souvent sur des défis. Les défaites ou une prise en main difficile peuvent provoquer un sentiment d’impuissance, ce qui génère de la frustration.

Tous les jeux vidéo peuvent-ils provoquer une frustration ?

Oui, même les jeux non violents peuvent frustrer. C’est le sentiment d’échec ou d’absence de maîtrise qui provoque des réactions, et non la nature du jeu.

Quelles solutions pour mieux gérer la frustration liée aux jeux vidéo ?

Privilégiez des pauses régulières, encouragez un dialogue sur les émotions, et rappelez que l’échec est une partie normale de l’apprentissage et de la progression.

Les jeunes joueurs sont-ils plus sensibles à la frustration ?

Oui, car ils apprennent encore à gérer leurs émotions. Sans accompagnement, ils peuvent mal interpréter l’échec comme une humiliation personnelle.

Fortnite est-il un jeu particulièrement violent ?

Non, Fortnite repose sur une compétition stratégique et n’est pas plus violent que d’autres jeux. Par contre, certains comportements, comme l’attachement extrême au jeu, peuvent poser problème.

Les parents doivent-ils s’inquiéter du lien entre jeux vidéo et violence ?

Non, mais cela n’exclut pas une vigilance. Les parents doivent surveiller les signes de dépendance, les comportements agressifs et dialoguer pour aider à gérer les émotions liées aux défaites.

Comment savoir si un joueur est trop affecté par un jeu vidéo ?

Un attachement extrême, des crises de colère fréquentes ou un désengagement envers d’autres activités peuvent être des signes d’un problème lié au jeu.

La compétition dans les jeux vidéo est-elle saine ?

Oui, la compétition peut stimuler les compétences et l’esprit de stratégie. Elle doit rester équilibrée, en valorisant l’effort, et non seulement la victoire.

Les jeux vidéo peuvent-ils avoir des impacts positifs ?

Oui, ils développent des compétences comme la rapidité de réflexion, la coordination ou le travail d’équipe. Comme pour n’importe quelle activité, un encadrement sain est primordial.

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En vidéo 🎬

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